mercredi 14 novembre 2012

La solitude du réel


Une envie soudaine d’histoires en passant devant une boutique de bandes-dessinées. Parfait. J’entre. Le vendeur a un sourire amical derrière sa frange. Atmosphère qui se prête à la rêverie. Flânant au fil des ouvrages, je laisse mes yeux vagabonder de titres en images.

Un récit illustré me plaît particulièrement. Je l’emmène vers le comptoir où trône un petit bol de chocolats. D’un sourire de gamin timide, l’homme m’encourage à en prendre. Mon fœtus et moi acceptons l’offre alléchante pendant que les bips de la caisse enregistreuse résonnent paisiblement. Au nom de nos deux estomacs, je remercie le vendeur bienveillant qui, semblant être mis en confiance par mon ventre arrondi, amorce une discussion sur les enfants et leurs amis imaginaires.

Forte d’une expérience de plusieurs années au contact invisible avec des personnages inventés, je lui soumets mes quelques observations sur le sujet. L’intéressé souhaite faire avancer le débat et nous discutons des risques et des avantages lorsqu’il y a partage d’amis imaginaires avec quelqu’un de bien réel.

La méfiance s’installe lorsque le vendeur bienveillant insiste sur les noms et caractéristiques de mes compagnons fictifs. Sachant que ceux-ci n’apprécieraient guère de se voir affublés d’un nouvel ami sans leur consentement préalable, je préfère clore cette discussion inattendue et me dirige vers la sortie en saluant mon interlocuteur. Celui-ci me retourne la politesse et adresse un sourire emprunt de mélancolie à mon ventre arrondi en lui lançant malicieusement : « Toi, au moins, tu ne te sentiras jamais seul. »

1 commentaire: