lundi 4 avril 2011

Au son d'un jukebox anarchique inutile

Chaussettes trouées encastrées dans des chaussures fermées, me voilà parée pour une soirée d'anniversaire classique. Des convives, des rires gras, des sourires figés, et de l'alcool pour détendre un peu le tout. Maladroite dans des habits sentant le savon et le déodorant, les dents apparaissant subtilement derrière un petit sourire avenant, je me faufile entre les invités pour trouver des têtes familières et quelques gouttes de bière. Discussions sans fond avec un peu d'aplomb, ping-pong de questions pour combler des lacunes dans les fiches identitaires des connaissances, qui passeront sans doute un jour au statut de potes, puis - s'ils ont passé les étapes qualificatives de la sociabilité - d'amis. 

Vient le moment de s'asseoir à table. L'angoisse. A côté de qui se placer ? Les gens se précipitent et réservent des chaises pour empêcher ceux qu'ils ne connaissent pas de se placer dans leur espace de discussion. Je pose mes fesses dans une zone inconnue, vierge de toute conversation animée. Le couple en face de moi ose un duo de sourires gênés avant d'ausculter à nouveau leurs verres désespérément vides. 

Un éclat de voix ridicule sur ma gauche m'informe que le joyeux luron de la soirée se situe à côté de moi. Celui qui se croit non seulement drôle, mais aussi irrésistible. Tel un bouton de radio dont le volume sonore est bloqué au maximum, le jeune homme fait partie d'une espèce qui apparaît régulièrement lors d'événements sociaux traditionnels - mariages, baptêmes, réunions de famille, etc. - et dont la mission consiste à débiter le plus de clichés inhérents à ces situations.

Aventurière, j'embraye sur des banalités pour assouplir les rides faciales de mes voisins d'en face. La mayonnaise prend gentiment, entrecoupée par moment par des éclats inutiles du jukebox anarchique d'à côté. Les organisateurs papillonnent dans toute la salle. A peine le temps d'effleurer leur chaise de leur postérieur qu'il faut à nouveau déplier les genoux pour repartir à toutes enjambées, évitant les enfants voletant un peu partout.


Repas. Fromages. Gâteau. Discours. Cadeaux. Remerciements. Le signal des départs est donné de manière subliminal. Certains se lèvent, remercient et s'en vont. Les autres, détendus par l'alcool ingurgité, profitent de cet instant pour assouvir leurs frustrations de la soirée et aller lancer une nouvelle discussion auprès de personnes assises en dehors de leur espace de conversation précédent.

Je me lève, observe les civilités d'usage précédant tout départ, salue le couple d'en face sous les éclats de voix de stentor de l'inutile, et mène mes jambes engourdies un peu titubantes vers la sortie.

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